C’est avec beaucoup d’assurance que Daphné MBAYE porte l’une des émissions phares de la chaîne Label TV. Avec Cheers, elle est passée du micro de radio au micro “cravate” avec aisance et propose un rendez-vous inédit à la TV gabonaise, une conversation avec des hommes de premier plan. Introspection, opinions sur des sujets de société, leur place dans le Gabon de 2021, tout y passe pour ces hommes peu souvent amenés à se confier sur ces questions.
Alors que le grand public la connaît notamment pour son rôle de chroniqueuse radio sur Street 103 FM, c’est surtout pour nous parler de son nouveau défi d’animatrice TV que Daphné MBAYE a bien voulu répondre à nos questions.
Vous évoluez depuis plusieurs années dans le monde des médias en tant que chroniqueuse radio, animatrice TV et planneur stratégique. Comment arrivez-vous à gérer toutes ces casquettes ?
En planifiant suffisamment à l’avance les tâches à réaliser, la fameuse « To Do List » est de rigueur; en fonction de chacune de mes activités et des projets auxquels je prends part, j’en fais une. Même si c’est six mois, voire un an à l’avance.
D’ailleurs, ça en agace certains mais c’est ainsi que j’arrive à anticiper et à réajuster mes tâches au quotidien. Mais heureusement, toutes ces activités que j’exerce à la radio, à la télé ou pour mon agence ne se font pas au même moment. Dieu merci.
Comment déclinez-vous concrètement chacune de ces fonctions au quotidien ? Quelle est une journée type pour Daphné Mbaye?
En tant qu’auto-entrepreneur, aucune journée ne se ressemble donc je n’ai pas de journée type. Je réorganise constamment mon emploi du temps au gré des imprévus et de leur niveau d’urgence. Mais actuellement, je suis temporairement à la co-animation de la matinale radio de Street 103 sur 103 FM. J’interviens en joker quand l’un des animateurs est absent.
En ce qui concerne la télé, j’organise les sessions d’enregistrement de Cheers sur une journée au cours de laquelle j’enchaîne deux à trois émissions; ce qui fait qu’en une session je boucle jusqu’à trois émissions de 52 minutes.
Enfin, le reste du temps, je le dédie aux différents projets que je conçois ou implémente pour les clients de mon agence.
Cheers est un talk-show unique dans le paysage audiovisuel gabonais. Qu’est-ce qui vous a motivé à proposer ce programme axé sur les hommes ?
Cheers est une co-production de mon agence et du diffuseur qui est LABEL TV.
Mon réalisateur Georges ABOKE, Directeur Général de Label TV, a détecté mon potentiel de façon très circonstancielle. Il m’a proposé de présenter différents programmes dont « Au masculin », le nom d’origine de l’émission pour faire écho à « FEMINA », une autre émission de la chaîne.
Sauf que le contenu initial ne me plaisait pas. Il m’a finalement donné carte blanche pour concevoir un programme qui me plaît avec une seule condition « ne recevoir que des hommes pour un format de 52 minutes » et c’est ainsi que Cheers est né.
J’ai retravaillé le concept de l’émission afin qu’il soit unique comme vous l’avez souligné. J’ai commencé par changer son nom, puis j’ai fait une refonte de la structure du programme en redéfinissant son positionnement. En effet, je tenais absolument à avoir un rendu qui paraisse à la fois décontracté dans la forme mais très « sérieux » dans le fond notamment par les sujets abordés.
Ensuite, il fallait adapter le ton, les rubriques ainsi que leurs noms au nouveau concept. Ce fut un réel plaisir de le faire d’autant plus que l’ensemble de la direction de la chaîne a aimé cette nouvelle proposition.
Est-ce facile pour vos invités de s’ouvrir et de vous confier des choses inédites ?
Je pense que c’est plutôt à eux de répondre à cette question.
Mais à observer les émissions déjà diffusées, je ne pense pas qu’ils le fassent sous la contrainte (rires). Je suis très avenante avec eux.
Tout d’abord, il faut savoir que je les contacte tous personnellement pour les inviter à l’émission. Donc il y a un premier contact qui se fait en dehors des caméras par SMS, appel, ou messages sur les réseaux sociaux. A partir du moment où ils sont d’accord pour faire l’émission, je leur envoie un protocole d’interview donc ils savent de quoi il en retourne de façon générale.
Toutefois, je comprends aisément que les caméras peuvent perturber un non-initié, mais le cadre et l’ambiance que j’installe d’emblée concourent à créer un moment intimiste car en réalité, il s’agit d’une conversation initiée avec mon invité et non d’une interview au sens conventionnel du terme. L’approche étant totalement différente, l’invité arrive ainsi à se détendre réellement, à profiter du moment et à s’ouvrir comme vous dites.
Dafresh, Manitou, Serge Abessolo, etc, vous avez déjà reçu des personnalités bien connues du public gabonais. Quelles sont les hommes publics (nationaux et internationaux) que vous rêveriez d’interviewer ?
En réalité, je n’ai pas d’attentes particulières au niveau des invités que je reçois car ils sont tous uniques de par leurs histoires, leurs expériences et ont donc une perception différente des problématiques liées au genre. Par conséquent, toute opinion aussi discutable soit-elle mérite d’être au moins entendue à défaut d’y adhérer.
Toutefois, s’il faut vous donner des noms, sur le plan local j’aimerais beaucoup avoir une conversation dans Cheers avec Henri-Claude OYIMA, Jean-Baptiste BIKALOU ainsi que Vickos EKONDO parce que leurs profils m’intéressent.
A l’international, il y a Cheick Yvanne, Jean-François YOMAN, Carlos LOPES, Fabrice SAWEGNON, Mactar SYLLA, Didier AWADI, Koffi OLOMIDÉ, Willy DUMBO, en fait ils sont nombreux.
Les seuls critères que je recherche personnellement chez mes invités sont l’éloquence avec un réel sens de la répartie et la sincérité de leurs propos. C’est tout. La notoriété ou la popularité m’importe très peu.
Cheers est un miroir de notre société contemporaine africaine à travers les opinions soutenues par les invités que je reçois.
Après plusieurs conversations déjà, quelle est, selon vous, la vision qu’ont les hommes gabonais de notre société actuelle ?
Les hommes gabonais sont conscients des évolutions sociales de notre environnement. Ils en sont les principaux acteurs, actifs ou passifs; ce qui est déjà un bon début.
Le premier constat que je fais c’est que l’homme gabonais est d’accord avec le fait qu’une femme s’épanouisse. Le paradoxe c’est que cet épanouissement doit d’abord et avant tout être profitable à l’homme. Quelle douce ironie !
Par contre, ce que j’ai également observé, c’est qu’ils subissent aussi énormément de pressions sur le plan familial, professionnel ou même sentimental. Au final, ils sont également des victimes de la société. Ils y font face du mieux qu’ils peuvent en tentant d’être des gentlemen, et encore, soit dans le pire cas de figure, en étant de parfaits pervers narcissiques.
Comment souhaiteriez-vous que Cheers évolue en tant qu’émission ?
Cheers est un programme qui ne reçoit certes que des hommes mais en réalité c’est une émission qui concerne tout le monde car on y aborde des sujets très variés allant de la politique à la religion, de la sexualité à l’éducation. Nous discutons de constats faits sur des problématiques liées à l’argent, au couple, à la filiation ou à la notion d’infidélité sous le prisme du genre. Et toutes ces thématiques nous concernent que nous soyons homme ou femme.
Je me rends compte que Cheers est un miroir de notre société contemporaine africaine à travers les opinions soutenues par les invités que je reçois. Mon souhait est que cette émission continue de l’être afin que les hommes et les femmes qui composent notre société se comprennent pour permettre à nos différences de ne pas demeurer des inégalités, mais qu’elles deviennent de véritables leviers pour une société égalitaire notamment en droit.