Elle sera pour toujours notre Oliwina. Olivia Biffot a fait une incursion dans nos foyers grâce à ce rôle dont on se souviendra longtemps. Actrice et scénariste, la jeune femme était peu connue du grand public africain jusqu’à ce 15 novembre 2021 où on la découvre à l’écran dans la peau d’Oliwina Aworet, une journaliste qui quitte sa vie et son métier à Ouagadougou pour retourner au Gabon à la recherche de son petit frère. La suite, nous la connaissons. Quatre semaines plus tard, Mami Wata : le mystère d’Iveza est un succès populaire. Il y aura un avant et un après Mami Wata. Encore sous le choc de cette fin de saison trépidante, nous avons demandé à Olivia Biffot de revenir sur son rôle et cette série qui marque un tournant dans la production audiovisuelle gabonaise.
Tout d’abord, avec cette série, avez-vous conscience d’avoir apporté de nouveaux standards en matière de fiction gabonaise ?
Oui, déjà parce que je lis les commentaires sur les réseaux sociaux, et c’est un propos qui ressort beaucoup. Quand je lis que « Mami Wata c’est comme Hollywood », je me dis que le boulot a été fait. Après, c’était clairement l’objectif. Mami Wata est la 1ère Création Canal + Originale Gabon. Tout le monde sur le plateau savait qu’on marquait l’histoire du pays, et ça nous donnait de la force pour affronter les challenges.
Vous attendiez-vous à un tel accueil de la part du public gabonais, généralement très critique ?
Oui, parce que Samantha connaît le public gabonais, elle l’a pratiqué et en plus de cela, elle avait des standards très élevés, et nous les connaissions tous. Mais sinon, c’est au moment de la première lecture du scénario avec les autres acteurs que j’ai compris. Les plus jeunes, comme les plus âgés, étaient scotchés et emballés. Parce que ce qui rend Mami Wata singulier, c’est que c’est une série intergénérationnelle. Tous les Gabonais peuvent s’identifier à un des personnages : jeunes, âgés, fortunés, moins fortunés, nous y sommes tous.
Que faudrait-il, selon vous, pour que d’autres réussissent à proposer le même type de productions de qualité ? Surtout dans un écosystème comme le nôtre sans véritable soutien matériel ou financier.
Je dirais qu’il ne faut pas hésiter à s’inspirer de ce qui est fait ailleurs. Comme quand le dernier de la classe copie sur le premier.
Je portais plus les habits d’Oliwina que les miens.
Vous avez porté cette série à merveille dans le rôle principal, et on ne peut ignorer le travail phénoménal du reste de l’équipe qui a su vous accompagner. Comment s’est déroulé le tournage et les relations avec vos collègues ?
Merci pour ce compliment, ça me touche beaucoup ! C’était extrêmement intense. Je suis quelqu’un de très souriant, qui adore rigoler, donc jouer le rôle d’Oliwina durant 5 mois et demi était drainant. Je tournais quasiment tous les jours. Je rentrais, j’apprenais mon texte, je dormais et rebelote. Je portais plus les habits d’Oliwina que les miens.
Il y avait un bel esprit d’entraide entre les acteurs. Ça a été un immense plaisir de tourner avec Ivane Izanguaud, qui est devenu un ami et Jean-Claude Mpaka et Marie-Michèle Zwank.
L’ambiance quand on tourne un drame n’est pas la même que lorsqu’on tourne une comédie, il y a une certaine tension sur le plateau. Je lis des commentaires de spectateurs qui disent avoir pleuré durant des scènes, imaginez ça en vrai… Heureusement, j’étais bien entourée. Avec l’équipe du HMC, ceux qui s’occupaient du maquillage, du dressing et de la coiffure, on mettait toujours de la musique pour détendre l’atmosphère. Avec les techniciens, on a dormi au Cap; durant un moment, il n’y avait pas d’eau courante, je me lavais au seau d’eau sur la plage et on dormait à trois dans une chambre. Le soir après le tournage, on dansait, on chantait. Ça me permettait de sortir du personnage, de redevenir Olivia. Je dois citer mes camarades de chambre, Linous et Carole, qui étaient mes rayons de soleil. Ça reste mes meilleurs souvenirs du tournage.
Vous nous avez tenu en haleine pendant des semaines, et pourtant Martial et Oliwina n’ont partagé que des moments tendres devant l’écran. Était-ce un choix pour vous et la réalisatrice, Samantha Biffot, de suggérer uniquement une intimité entre les deux, notamment avec la scène de la nuit passée ensemble ?
Ah le fameux ndolo de la gloire que tout le monde attendait ! (rires) Durant l’écriture de la série, nous avions mis une scène d’amour, juste après le rêve d’Oliwina. C’était une évidence pour nous. Mais lors du tournage, Samantha a changé d’avis. En ce qui me concerne, je pense qu’un bisou n’était pas de trop, parce que oui, Oliwina a des sentiments pour Martial. C’est un homme intègre, bienveillant et romantique. Surtout, il a plus de caractère qu’Honoré.
Oliwina traverse plusieurs émotions tout au long des épisodes, mais ce que l’on décèle surtout c’est une énorme détermination. Comment avez-vous appréhendé ce personnage pour bien l’interpréter dans sa complexité ?
J’avais un journal intime que j’utilisais pour écrire ce qu’Oliwina Aworet aurait écrit dans le sien. Oliwina Aworet fait partie de ces gens qui vivent les émotions de l’intérieur, donc j’avais besoin de les extérioriser pour mieux comprendre ce qu’elle ressent. Après, j’ai cherché à matérialiser le trauma du viol à travers la démarche garçonne, le dos arqué, et les regards pesants, comme s’il y avait des secrets cachés dans ses yeux.
Finalement, dans cette quête pour retrouver son fils, Oliwina effectuait aussi un voyage initiatique. A-t-elle réussi à se trouver selon vous ?
Je dirais qu’elle a réussi à faire la paix avec son passé, et donc en ayant confronté ses démons, elle ouvre la porte vers un nouveau chapitre, qui est celui de « la quête de soi ». Ce n’est que le début pour elle.
Quelle est la scène que vous avez pris le plus de plaisir à tourner ?
Toutes les scènes de course-poursuite à l’Arboretum Raponda Walker, parce que je courrais plus vite que Martial et Prince. Ils étaient très essoufflés et devaient boire beaucoup d’eau. C’est peut-être pour ça qu’on dit « La » Panthère du Gabon et pas « le » Panthère du Gabon… Je rigole. Mais c’était quand même les scènes de course-poursuite parce que j’aime l’action.
Et celle qui a été la plus éprouvante psychologiquement ?
La scène finale. Elle a été tournée en Islande, dans un lac à -3°C, avec des icebergs. Il y avait un risque d’hypothermie, donc un maitre-nageur était là pour vérifier la température de mon corps, qui ne devait pas tomber en-dessous de 35°C. J’ai pensé plusieurs fois à annuler parce que pour être honnête, j’avais peur de mourir. Mais j’ai une manager en or qui m’a énormément soutenue et qui m’a parlée de Leonardo DiCaprio qui avait aussi tourné dans les mêmes conditions pour The Revenant, le film qui lui a valu un Oscar. Du coup, j’ai lu ses interviews et je me suis dit que j’allais faire comme DiCaprio (rires). Je me suis préparée avec la méthode de respiration Wim Hof (surnommé « l’homme de glace » ndlr). Il a fallu que je me dépasse pour faire ça. J’ai ramené de l’eau du lac en souvenir de cette expérience.
Que souhaitez-vous que l’on retienne de Mami Wata : le mystère d’Iveza ?
Que c’est un miroir de la société Gabonaise.
À voir
Mami Wata : le mystère d’Iveza est une série créée par Samatha Biffot, co-réalisé avec Marco Tchicot. La série est une création originale diffusée sur Canal+ et son application MyCanal.