Ce ne sont pas moins de quatre dramaturges gabonais qui seront mis en scène lors de cette deuxième édition du Festival Coup de théâtre organisé du 5 au 9 avril à L’institut français du Gabon. De quoi, espérons-le, faire venir un public nombreux tant ces temps forts sont rares, faute d’infrastructures entre autre. Un art dramatique dont certains caciques du domaine déplorent « l’état comateux » actuel.
Il faut le reconnaître les énergies elles, sont là, tant au niveau du choix des textes que de l’existence de compagnies, le plus souvent privées, qui se battent au quotidien pour maintenir une tradition théâtrale au Gabon qui appartient à ses plus lointaines origines.
Le programme du Festival Coup de théâtre aura comme fil rouge, l’éternelle question du couple et des relations amoureuses:
Mardi 5 avril : ouverture des festivités avec Dram’Akouss, une pièce traitant de la délicate question du veuvage dans le Nord du pays. “On sait qu’une tradition archaïque exige le partage des biens de l’époux décédé parmi lesquels certains comptent sans vergogne la veuve, alors épousée par un neveu. Une situation d’autant plus ignoble que si la femme reste dans la famille, c’est avant tout pour travailler dans la plantation voire procurer à son nouvel époux des rapports”. Ce texte, s’inscrivant dans une des plus sombres réalités gabonaises, fut écrit par le dramaturge Ferdinand Allogoh Oké, décédé il y a deux ans et est mis en scène par Jean Hilaire Obame Essono, professeur d’art dramatique à la retraite. Il verra se produire des élèves du trop peu connu Théâtre National ainsi que de l’ENAM (Ecole Nationale des Arts et Manufactures).
Mercredi 6 avril: ce sera l’épineuse question des relations belle-mère/ belle-fille qui sera mise en scène dans Relali de Vincent Paul Nyonda. Si ce dramaturge des années post-indépendance, créateur du Théâtre National, a marqué la postérité par des pièces comme Bonjour Bessieux ou Deux albinos à La M’passa, ce texte moins connu permettra de faire découvrir l’étendue du talent de notre Molière gabonais. La mise en scène se fera sous la houlette de Stevie Moussirou le Sage à la tête de la troupe N’dossi (le rêve en punu).
Jeudi 7 avril: une création sera proposée par l’Atelier dramatique Eyeno (miroir en Myene) avec Les Convives, comédie purement gabonaise, écrite par le truculent Michel Ndaot. Fous rires garantis dans cette satire de la vie de couple se déroulant lors d’un mariage où le spectateur pénètre avec plaisir dans le secret des conversations des différentes tables.
Vendredi 8 avril: une oeuvre plus politique avec la pièce Bruits d’Afrique de Hasse Nziengui. Sur le campus d’un pays africain des universitaires discutent changement, démocratie, élections loufoques et pouvoir autoritaire. Conçu par le metteur en scène Dominique Douma comme un cri de révolte des peuples d’Afrique, ce texte servi par la compagnie les Renaissants, devrait rencontrer quelques échos avec des problématiques actuelles et pas nécessairement lointaines.
Samedi 9 avril: l’intarissable chantre du théâtre gabonais, Michel Ndaot mettra en scène un spectacle conçu par lui-même et intitulé Prévert-Bantu. L’occasion pour cet homme sensible et chaleureux de rendre hommage à un poète français ayant su critiquer depuis la France le système colonial et surtout de célébrer cette langue française que nous avons en partage. Les mots de l’auteur français sonneront donc dans la bouche de cet homme bantou pour célébrer conjointement « l’amour des mots et les mots d’amour » ainsi que le déclare non sans plaisir M. Ndaot.
Le spectacle sera organisé autour d’un choix subjectif fonctionnant comme autant de coups de cœur et proposera par la mise en scène – véritable deuxième écriture pour cet homme de théâtre – une vision africaine de la poésie de Prévert ponctuée par des chants en langue.
Une manière de nous rappeler, comme le dit le poète, de « (nous) habituer pour ne pas voir craquer vos billards le jour où les vrais éléphants viendront reprendre leur ivoire ».
Festival Coup de Théâtre. Institut français du Gabon. Du 5 au 9 avril. Spectacles à 19h. Entrée : 1000, 2000 et 3000 FCFA.