Grand homme de medias, panafricaniste, acteur incontournable dans le milieu du showbiz, Claudy Siar nous accorde une interview exclusive dans nos colonnes. The Voice Afrique Francophone, sa radio Tropique FM, les présidentielles au Gabon etc. Autant de sujets non éludés en y répondant avec le cœur et la sincérité dont on le connait.
GABON CELEBRITES: Bonjour Claudy Siar, vous êtes un habitué des émissions musicales et nous dirions même qu’il est impossible de parler de musique sur le continent sans vous mentionner. Qu’est-ce qui fait que vous soyez toujours autant sollicité ?
Claudy Siar : Dans la vie, l’important c’est d’être constant. Je pense que cela tient aussi bien à la sincérité de mes engagements qu’à mon implication dans le monde musical, que ce soit pour des artistes pop ou militants. Dans un monde dominé par l’Occident et les règles qu’il impose au reste de la planète, la culture est un des rares domaines où nous pouvons faire entendre nos voix, porter la contradiction, remporter de fulgurantes victoires. Cependant, même si nous ne réinventerons pas l’avion ni la fusée, nous ne devons être assignés à un rôle laissant aux autres la domination, des domaines réservés, et pour nous, le carcan du dominé.
GABON CELEBRITES : Le 15 Octobre 2016 est le lancement de The Voice Afrique, comment prépare t-on cette grosse émission musicale quand on en est le présentateur officiel ?
Claudy Siar : Déjà, je voudrais remercier la direction de VoxAfrica, Rolande Kammogne LA fondatrice et Jules Domche son directeur, de m’avoir proposé la présentation de TheVoice . Présenter est mon métier donc la façon d’aborder un tel programme n’est pas différente des autres émissions que je peux faire en radio ou en télé. Maintenant, TheVoice est le plus grand divertissement au monde ! Dans un monde globalisé, dans cette occidentalisation des peuples (que je regrette parfois), l’Afrique veut aussi jouer sa partition et mettre en lumière ses talents. C’est ce que va offrir TheVoice Afrique francophone.
GABON CELEBRITES : Avez-vous déjà rencontré les membres du jury de The Voice Afrique et comment comptez-vous créer une synergie pour capter l’audience durant les émissions ?
Claudy Siar : Ahahah…! Alors OUI j’ai fait plus que rencontrer les coachs. Nous avons beaucoup travaillé ! Le programme est exceptionnel ! D’une qualité digne des meilleures productions de l’histoire de la télévision et tous pays confondus. La synergie dont vous parlez c’est la magie que nous allons tous créer: les formidables équipes techniques et de rédaction, les 4 coachs: Charlotte Dipanda, Lokua Kanza, Singuila et Asalfo et les nombreux talents évidemment, venus de toute l’Afrique francophone. Ces artistes en devenir sont au cœur du programme. Je serai le trait d’union entre les protagonistes, une sorte d’alchimiste qui sans le talent de tous, ne peut rien offrir…
GABON CELEBRITES : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur l’organisation de l’émission. Le format, les castings, ce qui attend le gagnant, etc.?
Claudy Siar : Le plus grand des chefs ne dit pas tout ce qu’il se passe dans sa cuisine ! Ce que je peux vous dire c’est que la gagnante ou le gagnant remportera l’enregistrement d’un album et une extraordinaire mise en avant médiatique grâce aux nombreux et puissants partenaires de TheVoice/Voxafrica.
GABON CELEBRITES : En plus de The Voice Afrique, une autre émission sera adaptée sur le continent, l’Afrique a un incroyable talent. Que pensez-vous de cette tendance à adapter des contenus étrangers, notamment occidentaux ?
Claudy Siar : Nous manquons de vision en politique comme dans la culture et les medias…Oubliant la signification du mot indépendance ! J’ai longtemps été contre la reproduction en Afrique des concepts occidentaux, persuadé que les afros ont d’incroyables talents et devraient concevoir des programmes qui leurs ressemblent. Nous ne voyons pas toujours la soumission que cela induit de ne pas créer nos propres totems et quelque soit le domaine. L’avenir nous dira si nous avons eu tort ou raison…car aujourd’hui les africains regardent les chaînes internationales et veulent la même chose.
J’ajouterai “Tant que l’Afrique ne contrôlera pas l’information sur la scène continentale et internationale, son image sera toujours peu conforme à la réalité”
GABON CELEBRITES: Il ya 8ans en 2008 vous avez lancé l’un des plus gros shows télévisé jamais organisé en Afrique francophone, le concours AFRICA STAR, qui mettais en lumière les futurs talents de la musique africaine. Pourquoi ne pas avoir poursuivi l’aventure et la pérenniser ?
Claudy Siar : AfricaStar était une première en Afrique ! Ça a été difficile à monter car nous avions un petit budget au regard de ce que cela coûte en réalité. L’argent n’avait pas d’importance ! Nous étions animés d’une volonté farouche de donner à l’Afrique son propre programme de divertissement musical. L’hymne d’AfricaStar était “Africa unite” de Bob Marley ! Nous voulions délivrer un message d’unité, de panafricanisme. Mais comme pour Air Afrique, Africa N°1 (en Afrique), les dirigeants n’ont pas compris l’importance d’instaurer de l’indépendance médiatique. Cela m’amuse souvent de voir les uns et les autres créer des télévisions qui ne sont que le fait du prince et qui ne reposent sur aucun modèle économique viable et encore moins sur une ligne éditoriale efficiente, correspondant aux attentes. J’ai été approché par des personnalités afin de donner naissance à des medias. Mais rien ne s’est fait car mes interlocuteurs n’ont jamais été des gens sérieux dans leurs démarches pour l’Afrique. Voilà pourquoi, malgré mon optimisme naturel, je suis parfois dubitatif sur un avenir prospère pour les africains en Afrique… trop d’égoïsme trop d’individualisme et de réactions passionnelles et peu réfléchis des victimes de la mal gouvernance !
« Je suis animé par une détermination qui dépasse ma personne et mes envies. Je suis un descendant d’esclaves. Les douleurs de mes ancêtres, je les ressens chaque jour dans mon quotidien face aux injustices du monde. »
GABON CELEBRITES: Nous avons suivi il ya 1an votre combat concernant une injustice dont avez subi par rapport à votre radio Tropique FM. Qu’est-ce qu’il en est aujourd’hui à ce sujet ?
Claudy Siar : Avocats, tribunal, avocats, tribunal… discutions stériles, tromperies à répétition de mon adversaire envers tout le monde ! Si je suis allé aussi loin ce n’était pas parce qu’un ami/frère m’avait trahi ! Si ce n’était que cela, vous n’en auriez jamais rien su. J’ai imaginé et créé une radio pour que ma communauté se construise dans un pays, la France, où en réalité nous ne sommes pas acceptés à moins d’être un BON NÈGRE DOCILE ! Je m’étais donné 10 ans pour bâtir une communauté plus forte et dans la citoyenneté. L’actualité me donne malheureusement raison. Tout le monde voit ce que la France devient exprimant son racisme décomplexé, son islamophobie sans retenu…et nous, pauvres communautés afros, sommes incapables de réagir et encore moins de parler d’une seule voix. Voilà où est la pire des trahisons de cet homme, ex ami et j’espère bientôt, ex associé. Il ne comprend rien aux attentes de ma communauté, hypothéquant par ses agissements l’avenir de millions de gens pour s’emparer à des fins personnelles, d’un outil créé par un autre pour le plus grand nombre. Alors je me bats et je ne lâcherai rien face à cet homme qui en réalité cultive une jalousie destructrice envers moi. Ce n’est que cela. Il n’a jamais supporté de me voir glaner des victoires ici et là. J’ai mis du temps à le comprendre.
GABON CELEBRITES : Claudy nous remarquons que tout au long de votre carrière d’homme de medias vous avez fait face à d’innombrables expériences excellentes mais aussi difficiles à vivre. D’où vous vient cette énergie à toujours demeurer debout malgré les coups reçus?
Claudy Siar : Je suis animé par une détermination qui dépasse ma personne et mes envies. Je suis un descendant d’esclaves. Les douleurs de mes ancêtres, je les ressens chaque jour dans mon quotidien face aux injustices du monde. J’appartiens à l’universel. Mais la partie la plus blessée de mon être est mon antillanité, mon africanité. Par l’éducation distillée par ma mère, je peux aller très loin pour mes convictions …dans le respect de l’autre.
GABON CELEBRITES : Un conseil à adresser à ces hommes et femmes de medias qui vous prennent en exemple et qui désire avoir un parcours semblable au vôtre?
Claudy Siar : Juste leur dire que la passion des métiers des médias est une chose. Il faut travailler dur!! Cependant, vous vivez à une période charnière de l’histoire de l’Afrique et de ses diasporas. Les peuples noirs sont en phase de reconstruction de leurs êtres. Reconstitution morale, spirituelle, territoriale aussi. Vous devez avoir cela à l’esprit à chaque fois que vous prenez l’antenne ! Qu’importe votre sensibilité politique ou religieuse. Vous devez être capable d’être des bâtisseurs ! Avoir une vision claire de votre environnement et d’œuvrer dans le sens de l’évolution des mentalités. Nous devons changer si nous ne voulons pas léguer à nos enfants et aux générations futures un héritage de soumission permanente. Les dirigeants de nos Etats n’ont pas cette vision et c’est triste car quand on vit dans l’opulence, on oublie ce que veut dire avoir faim de liberté, de justice, d’égalité, de réussite pour une vie meilleure. La Génération Consciente n’est pas un dogmatisme mais bien un état d’esprit. Ne vous laissez pas griser par l’argent facile car plus tard vous ne pourrez pas dénoncer la corruption dont tout le monde se plaint, tout en participant au système. Soyez des êtres dignes au nom de l’estime de soi.
«Pour moi, un artiste doit être auprès des plus faibles.»
GABON CELEBRITES : Il s’est déroulé il y a quelques semaines les élections présidentielles au Gabon et actuellement le climat n’est pas au beau fixe notamment entre certains artistes et leurs fans. Ces derniers fustigent l’implication de leurs artistes en faveur du candidat Ali Bongo lors de la campagne présidentielle, occasionnant également une rupture, un divorce entre les artistes eux-mêmes qui voient en cela une forme de trahison. En tant que panafricaniste et acteur culturel quel regard portez-vous face à cette situation ? Et la question qu’on se pose aussi est celle de savoir si on peut être artiste et prendre ouvertement position pour un homme politique, votre avis ?
Claudy Siar : Un artiste est un citoyen. Il a le droit de prendre position. L’artiste joue un rôle central dans nos sociétés et il ne le mesure pas toujours. Il est regrettable qu’en RDC les artistes vendent leurs chansons pour une litanie de noms cités après paiement. L’argent pourrit les gens. Au Gabon, des artistes se sont engagés d’un coté ou de l’autre. On ne peut rien dire à cela. Néanmoins, chacun doit comprendre que son engagement lui fait porter une part de responsabilité dans les actes et propos de son candidat. Pour moi, un artiste doit être auprès des plus faibles. L’artiste a le droit de changer d’avis si justement il comprend que ses convictions profondes sont bafouées par celui qu’il croyait sincère.
GABON CELEBRITES : on s’achemine presque à la fin de notre entretien, y a-t-il un aspect que vous souhaitez revenir et qu’on n’a pas abordé ?
Claudy Siar : Je voudrais alerter les africains sur la troisième ruée vers l’Afrique que nous sommes en train de vivre, de subir. Après l’esclavage et la colonisation, ce nouvel appétit farouche des occidentaux et des asiatiques risque de définitivement faire de notre Continent une terre de servitude des populations autochtones au profit quasi-exclusif des multinationales et de leurs alliés locaux. Car la question est “sommes-nous armés, suffisamment structurés dans nos institutions et nos visions de nous-mêmes pour supporter, surmonter de tels désirs” ?
L’homme noir aurait été très différent si il n’avait pas subit les deux crimes contre l’humanité que constitue l’esclavage et la colonisation. Il regarderait autrement ses semblables. Ils auraient pour eux plus de considération ! Je rêve d’entendre un jour un chef d’état africain dire “mon peuple bénéficiera d’un des plus hauts niveaux de vie au monde” et agira en conséquence. Le Gabon en a la possibilité et pourtant beaucoup de gabonais souffrent toujours.
J’ai la prétention de dire “je sais ce qu’il faut faire mais je sais pourquoi ca ne marche pas au Gabon et ailleurs”.
GABON CELEBRITES : Un dernier message pour nos lecteurs et lectrices ?
Claudy Siar : Soyez fiers de ce que vous êtes et n’oubliez jamais que nous devons évoluer dans notre plus for intérieur si nous prétendons vouloir faire évoluer nos pays. Nous devons soigner nos traumatismes hérités d’un passé si présent. Que nous soyons petit et pauvre dans l’échelle sociale ou nanti et au pouvoir, nous sommes tous logés à la même enseigne.
Et puis je voulais rajouter et briser une idée reçu selon laquelle “Claudy Siar est l’ami des chefs d’états”. Il est temps pour moi de mettre un terme à ce que de petits détracteurs, des jaloux saboteurs font circuler sur les réseaux sociaux et depuis trop longtemps. J’aurai dû répliquer plus tôt. Mon entourage me demande toujours de ne pas réagir et c’est une erreur car la calomnie à pris de l’ampleur. Je ne suis pas l’ami des chefs d’états ni africains, ni français ! Par mon métier et mon statut j’en connais quelques uns. Mais je ne dîne pas à leur table. Ce n’est pas du mépris de ma part. Je ne me le permettrais pas.
Vous devez comprendre que ma personnalité ne peut pas convenir à la vision des mondes afros qu’ont certains ! Je suis pour eux, une source de contestations permanentes dont ils ne raffolent pas. Cela dit, à de très rares occasions, je n’hésite pas à dire “Mr le Président, vous devriez être plus proche du peuple pour le comprendre et répondre à ses attentes légitimes” Il m’arrive de donner mon opinion afin d’exprimer des principes. Les militants et les pseudos ont quelques fois du mal à me comprendre. On a parfois tort d’avoir raison trop tôt. Je reconnais avoir deux amis chefs d’états ; Michel Martelly l’ex-président d’Haiti et Patrice Talon, President de la Republique du Benin avec qui je partage une certaine philosophie de la vie et des rapports humains. Ces deux amitiés sont nées bien avant qu’ils n’occupent la fonction suprême. Je reconnais avoir déjeuné deux fois avec Laurent Gbagbo. Vous savez tout et j’espère avoir répondu aux interrogations de certains de vos lecteurs.
GABON CELEBRITES : Merci Claudy pour ce privilège en nous ayant accordé cet entretien exclusif. Toute l’équipe de GABON CELEBRITES vous souhaite du courage et le meilleur pour vos différents projets.
Claudy Siar : Merci à vous GABON CELEBRITES.
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